Vol. 80, Nº 4Reportages

Deux policiers s'approchent d'un jeune homme dans un stationnement.

Comprendre l’autisme

Collaborer pour mieux aider

Interagir avec des personnes autistes peut être difficile. Certains policiers suivent une formation pour mieux les reconnaître et les aider. Crédit : Leann Parker, GRC

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On sait depuis longtemps que la police intervient régulièrement auprès de personnes atteintes de troubles du spectre autistique, mais désormais, une formation de sensibilisation aide des agents de la GRC à mieux les reconnaître et à les aider.

En 2017, la GRC dans le comté de Lunenburg (Nouvelle-Écosse) a reçu de nombreux appels concernant des personnes autistes et les agents se sont tournés vers le gend. Rod Francis. Celui-ci, qui a pris sa retraite depuis, connaît bien l'autisme puisque son fils adolescent en est atteint.

« Je sais très bien comment il faut réagir, dit celui qui, fin 2017, a aidé à organiser des séances de formation sur le sujet à l'intention de ses collègues. »

Il a vu le fruit de ses efforts quelques mois plus tard dans une école locale, où un collègue a aidé un adolescent autiste.

« Le jeune était contrarié parce que ça ne marchait pas comme il voulait, relate-t-il; le policier, lui, était calme, a laissé beaucoup d'espace à l'adolescent et l'a convaincu de s'asseoir à son bureau, ce qui a aidé à désa-morcer la situation. »

Ça commence par la sensibilisation

La formation est partie d'un constat : le manque de sensibilisation à l'autisme.

« Souvent, lorsqu'on reçoit un appel, on sait seulement qu'il y a un jeune incontrôlable à la maison. On ne sait pas s'il s'agit d'un ado atteint de TSA, alors on procède comme si c'était une situation à haut risque et ça n'aide pas », analyse le gend. Francis.

Une étude réalisée en 2017 par le Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH) et l'Université York révèle que dans près de la moitié des cas, les policiers sont parvenus à calmer les choses, mais pour un tiers des autres c'est l'inverse qui s'est produit.

Selon Yona Lunsky, Ph.D., qui a codirigé l'étude, les policiers et autres premiers inter-venants gagneraient à être mieux préparés.

« Il y a tellement de formes d'autisme », fait remarquer l'experte scientifique au CAMH.

L'autisme est un trouble permanent du développement qui influe sur la façon de communiquer, d'entrer en relation avec les autres et d'appréhender le monde.

Le trouble peut être léger ou prononcé, il peut être diagnostiqué très tôt dans la vie ou seulement à l'âge adulte et il s'accompagne parfois d'une déficience intellectuelle.

Enfin, les difficultés de communication sociale du sujet peuvent être subtiles ou sévères, pouvant aller jusqu'à l'incapacité totale de communiquer verbalement.

Mme Lunsky note également que les personnes autistes sont plus susceptibles d'être victimes d'actes criminels. « Les poli-ciers doivent donc en être conscients et être tout aussi attentifs à leurs besoins dans ces cas-là », dit-elle.

Tendre la main à la communauté

Dans le Lower Mainland (C.-B.), le s.é.-m. Stephen Blair Hurst de la GRC a contribué à sensibiliser des centaines d'agents avec l'appui du Pacific Autism Family Network.

« Nous travaillons sur des scénarios réalistes, » explique-t-il. Exemple : on signale la présence d'un jeune homme, portant un chandail à capuchon et un sac à dos, qui scrute l'intérieur de voitures garées dans un stationnement. À l'arrivée des policiers, le jeune ignore les agents qui peuvent alors croire qu'il s'apprêtait à forcer des véhicules ou qu'il a quelque chose à se reprocher.

Or, il se pourrait que ce soit tout bonnement un jeune atteint de TSA qui a des problèmes sensoriels. Il peut être non verbal et communiquer sans contact visuel.

« On ne s'attend pas à ce que nos membres posent un diagnostic, mais plus ils en sauront sur les TSA, mieux ce sera; la sensibilisation est capitale. »

Psychologue clinicienne, Mme Lunsky croit qu'il est essentiel que la police communique avec la communauté de l'autisme pour trouver des solutions.

« Il est très important d'apprendre à connaître les gens quand ils ne sont pas en crise pour mieux les comprendre ».

Et selon elle, les premiers intervenants peuvent en apprendre davantage sur les TSA.

« Chaque mauvaise expérience vécue par une personne autistique influe sur sa façon d'interagir avec la police la fois suivante, dit-elle. Mais même après une intervention, les policiers peuvent toujours se demander comment ils pourraient mieux réagir et mieux l'aider la prochaine fois. »

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