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Enquêteurs de la GRC déployés à l’étranger pour mener des entrevues

Malgré la pandémie, des enquêteurs de la GRC sont allés au Bangladesh en septembre 2020 pour interroger les témoins d'un présumé génocide au Myanmar. Crédit : GRC

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Chargé d'une enquête internationale complexe l'été dernier, un équipe de la GRC a changé de stratégie et est allé à l'étranger interroger des témoins en personne, en 2020.

Les enquêteurs de l'Équipe des enquêtes extraterritoriales et de nature délicate ont comme principal rôle de mener des enquêtes criminelles sur des cas contemporains de crimes de guerres, de crimes contre l'humanité et de génocides.

Dans cette affaire, l'enquête portait sur des allégations contre l'armée du Myanmar qui aurait commis des atrocités contre les musulmans rohingyas.

Au départ, des entrevues à distance étaient prévues entre les enquêteurs de la GRC à Ottawa et les témoins du présumé génocide au Bangladesh. Avec un décalage horaire de 10 heures, les agents interrogeaient les témoins par vidéoconférence la nuit à Ottawa.

« Les enquêteurs rentraient à 22 h pour faire les entrevues, dit le cap. David Proulx, membre de l'équipe, qui fait partie de la section des Enquêtes internationales et de nature délicate (EIND) de la GRC à la division nationale à Ottawa. C'était la meilleure option compte tenu de la COVID, mais dans ce genre de travail, il faut établir une bonne relation avec la personne pour voir sa réaction. »

En raison des pannes de courant au Bangladesh et des difficultés liées au travail avec un interprète, les entrevues, qui auraient dû prendre quatre ou cinq heures, s'étiraient sur plusieurs nuits.

De plus, les avocats du gouvernement de la Gambie qui avaient déposé la demande devant la Cour pénale internationale alléguant les atrocités avaient besoin des témoignages pour appuyer leur demande.

« Nous avions des entrevues à faire et nous avons décidé de les faire sur place, dit le serg. Yves Gravelle, chef du groupe des EIND. La planification du voyage a comporté quelques défis. »

Changement de stratégie

Une équipe de cinq enquêteurs a été rapidement rassemblée et des dispositions de voyage ont été prises pour mener les entrevues en personne près de Cox's Bazar au Bangladesh.

« Est-ce que je voulais y aller en pleine pandémie? Ce n'était pas sur ma liste de choses à faire, mais je savais qu'ils avaient besoin d'aide », dit la s.-m. Elaine Maisonneuve, qui à ce moment-là travaillait aux Missions de paix internationales de la GRC à Ottawa.

Les agents sont arrivés le 21 septembre.

Ils ont travaillé tous les jours pendant trois semaines dans la chaleur et l'humidité tout en portant un masque et en gardant une distance physique dans une petite maison de deux pièces pour interroger les témoins et fournir leurs déclarations signées aux avocats.

Leur travail était axé sur les survivants du massacre de Tula Toli, une tuerie de masse des Rohingyas qui aurait été perpétrée en août 2017 par des soldats du Myanmar.

« Un témoin plus âgé nous a raconté que son fils de 27 ans a reçu une balle et est tombé par terre à côté de lui, dit le cap. François Cormier, enquêteur du groupe des EIND. Il tenait la photo de son fils dans ses mains et a continué, en pleurant, de faire sa déclaration pour que le monde sache ce qui est arrivé au Myanmar. »

Chaque jour, les enquêteurs ont entendu des récits similaires d'hommes, de femmes et d'enfants assassinés, de viols et de personnes fuyant pour rester en vie.

« Ce qu'ils décrivaient, ils n'avaient jamais pensé vivre ça un jour, ajoute le cap. Cormier. Ils fondaient en larmes en racontant que leur pays ne voulait pas d'eux. »

Histoires d'horreur

Les enquêteurs se sont préparés mentalement aux récits difficiles qu'ils allaient entendre.

« Il faut se dire qu'on enquête sur des homicides historiques, dit le serg. Gravelle. Il faut faire preuve d'un certain détachement et écouter ce qu'on entend. »

C'était impossible de tout prévoir.

« Un homme m'a dit qu'il n'avait pas eu le temps de libérer son bétail, relate la s. m. Maisonneuve. Il suppose que les bêtes ont été tuées, incapables de se sauver. J'aime les animaux et cela m'a frappée, car je voyais à quel point ses bêtes étaient importantes pour lui. Elles étaient tout ce qu'il avait. »

Après les entrevues, les enquêteurs ont rédigé une déclaration formelle des faits, qui a été lue aux témoins pour en assurer l'exactitude.

L'équipe a terminé son travail le 8 octobre, à temps pour les avocats de la Gambie qui devaient déposer leur demande à la Cour pénale internationale le 23 octobre.

« Nous avons la responsabilité de les aider, dit la s.-m. Maisonneuve. Nous sommes tellement privilégiés de vivre au Canada que nous leur devons d'aider à bâtir un monde plus sûr. Ils nous étaient reconnaissants d'être venus sur place pour écouter et consigner ce qui leur est arrivé. »

Les membres de l'équipe sont revenus à la maison le 10 octobre et se sont isolés pendant 14 jours.

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