Chacun a sa propre idée sur ce qui constitue de l'« excellent travail policier ». Bravoure, héroïsme et altruisme viennent tout de suite à l'esprit. Mais en réalité, des qualités plus ordinaires – par exemple l'attention aux détails et la persévérance – suffisent pour faire du bon travail. Nous avons demandé à des employés de secteurs variés de la GRC de nous dire quelles qualités ils associaient à l'atteinte de résultats exceptionnels.
Les spécialistes :
- Jon Tamlin, formateur à la Division Dépôt, Groupe de la formation par simulateur, Regina (Sask.)
- Cap. Andy Wetzstein, superviseur recruteur proactif, Recrutement de la Division K (Alb.)
- Cap. Adam Von Niessen, superviseur des opérations, Détachement de Hudson Bay/Porcupine Plain (Sask.)
- Surint. René Bernard, officier de la GRC responsable du Centre de décision en matière de réinstallations, Gestion générale et contrôle, Ottawa (Ont.)
Cap. Jon Tamlin
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Pour répondre, je dois prendre du recul et, en ma qualité d'instructeur à la Division Dépôt (école de police de la GRC), réfléchir aux éléments de formation susceptibles de guider les cadets sur le chemin de l'excellence. Au cours des mois et années à venir, ceux-ci découvriront les multiples facettes du travail policier de premier ordre. La qualité sur laquelle j'insiste le plus et que j'essaie au mieux d'incarner est l'honnêteté. « Cette qualité vous servira durant toute votre carrière, c'est sur elle que vous bâtirez votre réputation », voilà ce que je dis aux cadets.
Être honnête ne se réduit pas à ne pas voler de pièces à conviction ou de piles au détachement. Quoi faire en cas de notification du plus proche parent (NPPP)? Si la famille demande des détails, quel degré d'honnêteté doit caractériser ma réponse? Ces questions que les cadets se posent, il est malaisé d'y répondre. Être honnête, c'est plus facile à dire qu'à faire.
Être honnête et membre de la GRC n'est pas de tout repos. En ce moment, la GRC met l'accent sur l'absence de harcèlement en milieu de travail. L'éducation en ce sens débute à la Division Dépôt, où l'on attend des cadets qu'ils se conduisent dignement et verbalisent leur sentiment d'être victime de harcèlement, le cas échéant. Ce dernier point ne va pas de
soi : la victime doit faire preuve d'honnêteté et de professionnalisme pour parler du comportement déplacé avec la personne concernée. Être honnête devient très difficile quand il s'agit d'entamer un dialogue avec quelqu'un au sujet de son comportement à notre endroit. Est-ce plus facile quand on est sûr que l'autre se montre totalement honnête? Est-ce qu'on manque d'honnêteté quand, à la question « qu'est-ce qui t'embête? », on répond « rien »?
« En route vers la préparation mentale » est une autre initiative de la GRC. Qu'en est-il de l'honnêteté dans ce contexte? Comment puis-je, en tant que formateur à la Division Dépôt, aborder avec les cadets la question de leur santé mentale, actuelle et à venir, et parler de ma propre expérience à ce chapitre? Ma relation avec les cadets diffère-t-elle beaucoup de celle que le superviseur ou le gestionnaire a avec les membres et employés sous ses ordres? Je suis sans doute aussi mal à l'aise d'écrire là-dessus que d'autres le sont de lire à ce propos. Ce sujet est pour moi encore plus embêtant que la NPPP ou le harcèlement, car il exige que je commence par être honnête avec moi-même. Et dire que je trouvais difficile d'être honnête avec les autres!
L'honnêteté favorise-t-elle l'excellence du travail policier? Je le pense. Je crois qu'en abordant avec honnêteté les discussions
épinuses « à l'inter-ne », on contribue à la qualité du travail sur le terrain. Ceux que nous servons, tout comme nos frères et sœurs, méritent notre honnêteté. Soyez bons et honnêtes les uns envers les autres, et restez toujours prudents.
Cap. Andy Wetzstein
Mon équipe et moi communiquons régulièrement avec le public pour lui faire savoir quelles sont les qualités que la GRC souhaite trouver chez ses recrues. C'est l'une des tâches les plus importantes qui incombent aux recruteurs proactifs de la GRC. Faire connaître clairement aux postulants les valeurs et qualités personnelles que promeut et recherche la GRC contribue à garantir le recrutement et l'envoi à la Division Dépôt des candidats les plus prometteurs.
Quelles sont donc ces valeurs et qualités personnelles? Les candidats admis sont profondément attachés aux six valeurs fondamentales de la GRC : honnêteté, intégrité, professionnalisme, compassion, responsabilité et respect. Les candidats qui sont admis à l'École et deviennent membres réguliers (policiers) tendent spontanément et sans demi-mesure à agir en accord avec ces valeurs.
Je dis souvent aux postulants qu'il n'y a personne de parfait. Dans le métier de po-licier comme dans la vie en général, il arrive qu'on fasse des erreurs. La GRC veut attirer des gens qui savent assumer la responsabilité de leur erreurs et, plus important encore, qui savent en tirer des leçons de manière à progresser sur les plans personnel et professionnel. Le candidat ou cadet qui reste fidèle aux valeurs fondamentales de la GRC en période de stress a toutes les chances de devenir, en conservant cette attitude, un policier accomplissant de l'excellent travail.
Le fait d'être motivé m'est apparu comme un autre important facteur de bon rendement et de succès. Les candidats et cadets très motivés tendent à devenir des policiers performants. Dans les périodes occupées, notre effectif doit rester motivé pour continuer à donner le meilleur de lui-même, mais une motivation élevée est tout aussi nécessaire lorsque les demandes de service sont rares. Celui qui, animé d'une motivation intrinsèque, est proactif et prend l'initiative de tâches utiles durant les périodes calmes est sans doute sur la voie de grands accomplissements.
Il est entendu que nos cadets et futurs membres doivent être performants sur le plan individuel, mais il faut aussi qu'ils sachent travailler en équipe, car, dans notre métier, des vies sont en jeu. L'incapacité à collaborer efficacement peut avoir des conséquences désastreuses. Dès le jour 1 de la formation s'impose le « nous » et s'effacent les « je ». Employer les forces des uns pour compenser les faiblesses des autres en vue d'atteindre le but visé est une chose merveilleuse. L'esprit d'équipe, donc, est une qualité indispensable au succès du travail policier.
Comme nos membres exercent leurs fonctions dans l'espace public, le leadership et la maturité sont deux autres qualités qui méritent d'être mentionnées. Donner l'exemple en faisant preuve de maturité, aussi bien pendant qu'après le service, produit souvent d'heureux résultats. Pour la GRC, les meilleurs de ses membres sont des piliers dans leur communauté. Grâce à leur implication et leurs solides relations avec la population locale, ils contribuent à réduire la criminalité et à accroître le taux de résolution des affaires criminelles.
Mais à mon avis, la plus importante qualité que doivent posséder nos cadets et futurs membres pour faire du bon travail, c'est ce que les services de recrutement appellent un « bagage d'expérience diversifié ». Contexte familial, emplois, études, bénévolat, voyages, etc. tracent pour chacun un parcours unique. Nous souhaitons que les postulants élargissent le plus possible leur champ d'expérience. Un tel bagage non seulement les aidera, en tant que policiers, à comprendre les gens à qui ils ont affaire, mais aussi, espérons-le, à savoir comment agir et réagir dans les situations imprévisibles et exigeantes qu'ils sont appelés à rencontrer.
Cap. Adam Von Niessen
Tout mon travail en formation pratique s'est fait dans la région du Nord-Ouest. J'ai eu l'occasion d'encadrer de nouveaux membres (policiers) jusqu'à leur réussite au programme de formation pratique ou jusqu'à leur renvoi de la GRC. Par ailleurs, je donne le cours de formation pratique depuis environ huit ans.
D'après moi, entamer sa carrière du bon pied est essentiel au succès de la recrue comme de la GRC. La diversité des dynamiques des milieux auxquels les nouveaux membres sont confrontés partout au pays sont source de difficultés. C'est avec enthousiasme et l'esprit ouvert que le nouveau membre et le moniteur de formation pratique doivent s'attaquer à ces difficultés.
La différence entre ce que la recrue doit « apporter » à son métier et ce qu'elle doit « apprendre » est aussi limpide que la distinction entre compétences organisationnelles et fonctionnelles.
Nous pouvons leur enseigner les com-pétences fonctionnelles (p. ex. conduite d'une enquête, préparation d'un témoignage devant le tribunal), pour autant qu'ils veuillent apprendre.
Mais, d'après ce que j'ai pu constater, les compétences organisationnelles, qui sont des caractéristiques personnelles, s'enracinent en chacun au fil de ses expériences propres. Elles se rapportent au vécu et à l'éducation. Elles reflètent les valeurs fondamentales de la GRC : honnêteté, intégrité, professionnalisme, compassion, responsabilité et respect.
Habileté à communiquer et flexibilité, telles sont les deux compétences ou qualités personnelles qui me sont au fil du temps apparues comme les plus cruciales. Elles sont pour moi à la fois les plus faciles à démontrer par l'exemple et les plus difficiles à enseigner.
Nul besoin de rappeler l'importance de la flexibilité à la GRC. La multiplicité des tâches que remplissent chaque jour les membres affectés aux services généraux, conjuguée à la diversité des environnements rencontrés, rend nécessaire, chez les nouveaux membres, la faculté de s'adapter rapidement à des situations changeantes.
Par ailleurs, je ne saurais trop insister sur l'importance de l'aptitude à la communication. Si je me fie à mon expérence, cette aptitude est le plus précieux des outils du nouveau membre, qu'il doive désamorcer une situation où l'on applique le MIGI (Modèle d'intervention pour la gestion d'incidents) ou s'assurer que la population comprend le message qu'on lui adresse. C'est la plus utile des compétences de l'enquêteur, car d'elle peut dépendre le succès ou l'échec de son action.
Il incombe aux chefs de détachement de choisir des moniteurs de formation pratique qui possèdent ces qualités et savent en faire preuve jour après jour de manière à ce que le nouveau membre connaisse un bon début de carrière et se révèle utile à l'ensemble de l'organisation.
Surint. René Bernard
Quand il est bien fait, le travail policier permet de protéger les personnes et les biens. Ayez l'audace d'essayer des choses nouvelles, même si cela semble difficile. Tirez des leçons de vos expériences. Vous serez peut-être maladroits et intimidés lors de vos premiers interrogatoires, mais vous découvrirez bientôt le plaisir qu'il y a à poser « la » question qui décontenance le suspect. Obtenir des aveux, résoudre une affaire, voilà des succès qui mènent à l'excellence.
Soyez proactifs en tirant parti des occasions qui se présentent. Par exemple, en faisant arrêter le véhicule qui vient de brûler un stop ou dont un feu arrière ne fonctionne pas, il se peut que vous interceptiez un conducteur en état d'ébriété ou mettiez fin à quelque autre comportement délictueux. Sachez profiter de vos quarts du dimanche soir : comme la plupart des gens sont chez eux, c'est un bon moment pour tenter de retrouver un témoin ou un suspect difficile à joindre.
Il est bon de se rappeler ce qui nous a fait choisir ce métier, par exemple le désir d'aider autrui. On connaît du succès quand on s'engage totalement dans ce qu'on fait et qu'on cherche à lier contact avec les personnes rencontrées en cours d'enquête. Allons plus loin : si vous constatez un problème, tentez de le résoudre ou de le pallier. Moi, c'est après avoir enquêté sur des accidents de la route mortels que j'ai vraiment pris conscience de l'importance de la sécurité routière.
Membres chevronnés, moniteurs de formation pratique et superviseurs dirigent d'autant plus aisément leur équipe qu'ils ont su développer leurs aptitudes communicationnelles. Maintenir des liens avec ses collègues et subordonnés favorise un climat de collaboration. En leur demandant comment ils vont, on leur fait sentir que leur bien-être nous importe.
Ne craignez pas les conflits et cherchez à clarifier la situation. Lorsque quelqu'un nous dit quelque chose de négatif ou agit bizarrement à notre endroit, il est normal de présumer qu'on a mal agi. C'est là un sentiment désagréable qu'éprouvent fréquemment les superviseurs. Si cela arrive, tâchez de ne pas le prendre personnellement et ne faites aucune conjecture. Cherchez plutôt à clarifier la situation en demandant à l'intéressé ce qu'il veut dire. Les conflits résultent souvent de simples malentendus. En posant la question « que veux-tu dire? », on permet à son interlocuteur de reformuler et d'éclaircir ce qu'il a dit.
Les infractions au code de la route sont extrêmement fréquentes. Chacune offre des possibilités d'enquête aux policiers chargés de l'affaire, et il est de notre devoir de faire quelque chose à ce sujet. Ne cessez jamais d'apprendre, exercez vos compétences et développez-en de nouvelles – ainsi serez-vous amenés à effectuer un travail de qualité dont vous pourrez être fier.